Grand Prix FRM 2020 : Giacomo Cavalli

04 novembre 2020

Giacomo CavalliGiacomo Cavalli

Directeur de recherche au CNRS, Giacomo Cavalli est à la tête de l'équipe « Chromatine et Biologie Cellulaire » à l'Institut de génétique humaine (UMR 9002 CNRS, Université de Montpellier), à Montpellier.

Au fil de sa carrière, le chercheur a largement contribué à éclairer l'épigénétique. Un domaine qui nous apprend que le vivant ne se réduit pas à ses gènes ; des facteurs autres que génétiques, dits « épigénétiques », interviennent dans leur régulation et déterminent le devenir de chacune de nos cellules.

Ils peuvent aussi contribuer à la survenue de maladies.

Giacomo Cavalli, portrait du Grand Prix 2020 de la Fondation pour la Recherche Médicale

Dès le secondaire, à Parme, Giacomo Cavalli se questionne sur les secrets du vivant. C'est le moment où la biologie moléculaire prend son essor, où l'ADN commence à être manipulé et les gènes qu'il porte laborieusement séquencés.

Étudiant la biologie à l'Université, il se demande si tout le devenir d'un organisme tient vraiment dans cette molécule. Comment expliquer qu'une cellule, qui partage la même séquence d'ADN avec toutes celles du même organisme, ait une destinée bien établie et une expression différente de ses gènes, selon qu'elle est nerveuse ou musculaire ?

Pour aborder ce sujet, il décide pour son doctorat de rejoindre un laboratoire de l'École Polytechnique Fédérale de Zurich, en Suisse, qui est l'un des rares à travailler sur cette thématique.

Et les premières réponses qui se dessinent l'encouragent dans cette voie.

Cavalli-LaboCavalli-Labo

L'hérédité, pas seulement une question de gènes

Le doctorant fait ses armes dans un organisme modèle à une seule cellule, la levure de bière. Il étudie l'organisation de l'ADN et son lien avec l'expression des gènes. Et la question est de taille : la molécule d'ADN, longue de 1 centimètre environ, est condensée dans un noyau de cinq milliardièmes de millimètre cube. Or, cette architecture compactée doit néanmoins ménager un accès aux gènes pour les facteurs qui les transcrivent première étape de la fabrication des protéines , pour ceux qui réparent l'ADN endommagé, etc. Les expérimentations de Giacomo Cavalli lui permettent de décrire les ballets moléculaires à l'œuvre dans ces processus vitaux pour la cellule.

Le jeune chercheur poursuit sa formation en post-doctorat à Heidelberg, en Allemagne, et s'attelle à un modèle plus complexe, la mouche du vinaigre. Il montre alors qu'il est possible de modifier le devenir des cellules et de l'organisme entier par un stress (un simple choc de température).

Cette reprogrammation, qui passe par la modification du compactage de l'ADN, sans toucher à la séquence de l'ADN et des gènes, est pourtant héritable. Elle peut même être transmise à la descendance pendant plusieurs générations. Et, contrairement aux mutations de l'ADN, elle est réversible.

De l'architecture du matériel génétique aux maladies humaines

Le chercheur, établi dorénavant à Montpellier avec sa propre équipe, fait d'autres découvertes marquantes sur les chromosomes de la mouche et contribue à faire croître l'intérêt pour l'épigénétique. Son laboratoire décrit, pour la première fois, une organisation supérieure des chromosomes (qui sont une forme compactée de l'ADN) en grands domaines.

Les gènes appartenant aux mêmes domaines sont régulés ensemble, ce qui permet un fonctionnement optimal. Autre éclairage d'importance, l'équipe étudie un groupe de protéines, appelées Polycomb, qui joue un rôle central dans le maintien de la compaction du matériel génétique et la répression de certains gènes.

Or, il s'avère que certaines de ces protéines sont mutées dans des cancers ou des maladies neurologiques rares qui présentent toutes un déficit intellectuel, des troubles du spectre autistique ou des malformations congénitales.

Depuis quelques années, ce volet rapproche donc Giacomo Cavalli de recherches plus translationnelles. Au travers de collaborations avec des équipes de chercheurs et de cliniciens, il met ses découvertes fondamentales au service de la thérapeutique.

Ainsi, un brevet a été déposé concernant le diagnostic du myélome multiple (une forme de cancer rare de la moelle osseuse). Ses recherches restent actives pour tenter de contrer cette pathologie très agressive.

Les nombreux mystères qui demeurent aujourd'hui autour du rôle de l'épigénétique dans la survenue de maladies déboucheront demain, sans nul doute, sur des perspectives thérapeutiques inédites auxquelles Giacomo Cavalli ne sera pas étranger. Tout jeune étudiant, il n'avait certes pas prévu que ses questions fondamentales l'emmèneraient sur ce versant. Aujourd'hui, il ne peut que se féliciter de pouvoir mettre sa passion au service de la santé.

Parcours

  • Après des études à l'Université de Parme, Giacomo Cavalli effectue ses travaux de doctorat sur la régulation épigénétique des gènes de levure aux côtés des Professeurs Fritz Thoma et Theodor Koller, à l'École Polytechnique Fédérale de Zurich, en Suisse.
  • En 1995, il poursuit sa formation de chercheur lors d'un post-doctorat dans le laboratoire du Professeur Renato Paro, à l'Université de Heidelberg, en Allemagne. Il poursuit sa thématique en passant à l'étude d'un organisme plus complexe, la mouche du vinaigre (ou drosophile).
  • Il s'établit en France en 1999, en montant sa propre équipe à l'Institut de génétique humaine (IGH) de Montpellier. Il a dirigé l'IGH de 2010 à 2014.
  • Il est aujourd'hui à la tête de l'équipe « Chromatine et Biologie Cellulaire ».

DISTINCTIONS

  • 2012 : Prix de la Fondation Allianz, Académie des Sciences
  • 2011 : Médaille d'argent du CNRS
  • 2008 : Grand Prix quadriennal Paul Doisteau Émile Blutet, Académie des Sciences-Institut de France

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