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Des substances ne contenant aucun principe actif ou des chirurgies « fantômes » peuvent améliorer l'état de santé de certains malades. C'est ce qu'on appelle l'effet placebo. Largement étudié depuis de nombreuses années, il n'est aujourd'hui pas remis en cause. Il comporte en revanche de nombreuses limites.
Point de vue de deux experts.
Didier Bouhassira
Médecin et neurologue, directeur de l'unité Inserm 987 « Physiopathologie et pharmacologie clinique de la douleur » à l'hôpital Ambroise-Paré (AP-HP, Boulogne-Billancourt)
François Chast
Pharmacien, ancien chef du service de pharmacie clinique à Cochin - Hôtel Dieu et Necker Enfants malades (AP-HP, Paris), président honoraire de l'Académie de pharmacie
OUI
Dans la lutte contre la douleur, l'effet placebo est très efficace. Que le patient souffre de douleurs légères ou très importantes et que l'on utilise du paracétamol (antidouleur léger) ou de la morphine (antidouleur très fort) comme médicament en comparaison, on a toujours entre 30 et 40 % des patients traités par un placebo qui voient leur douleur soulagée aussi bien qu'avec le traitement actif. Ce phénomène a été observé à de multiples reprises dans des études scientifiques très sérieuses. Conséquence : lorsque l'on donne un véritable médicament, il y a en réalité deux effets, celui de la substance active qu'il contient mais aussi un effet placebo non spécifique. Pour comprendre l'effet placebo, on utilise par exemple l'imagerie fonctionnelle* qui permet de visualiser ce qui se passe dans le cerveau. On sait par ailleurs que cet effet puissant peut durer des mois, voire des années. Parfois, on observe même des effets secondaires, comme c'est le cas pour un antidouleur classique ! C'est dire la puissance du cerveau et de l'organisme pour recréer un effet thérapeutique. L'effet placebo est un des meilleurs exemples de la relation corps/esprit, c'est-à-dire des interactions qui peuvent exister entre notre esprit et notre corps. Aujourd'hui, des études sont menées pour comprendre comment influer sur cet effet placebo et savoir s'il est possible de l'augmenter en utilisant par exemple la stimulation magnétique transcrânienne**, une technique non invasive et non dangereuse.
OUI, MAIS…
Certains considèrent que les placebos sont de « faux médicaments », dans le sens où ils ne contiennent pas de substance active. Mais force est de constater que, dans plus de 35 % des situations, ils agissent bel et bien ! L'effet placebo est réel, il ne s'agit pas d'une vue de l'esprit. Et ce phénomène ne concerne d'ailleurs pas que les médicaments, il a aussi été observé et étudié en chirurgie. Concernant la méniscectomie, qui consiste à enlever le ménisque pour soulager l'articulation du genou, il a par exemple été démontré qu'on obtient le même effet avec une opération fantôme ou placebo qu'avec une véritable opération. En pratique, lors d'une opération fantôme, on endort le patient et on provoque une cicatrice sur le plan cutané sans intervenir sur le ménisque. Cet effet placebo existe aussi lorsque l'on prescrit un « placebo honnête », ou conscient, c'est-à-dire lorsque l'on donne au patient un médicament ne contenant aucune substance active mais qu'on l'informe sur l'existence de cet effet placebo. Ce qui démontre que la qualité de la relation entre le médecin et son patient est l'un des fondements de l'effet placebo. Par ailleurs, l'intensité de l'effet placebo varie selon si le médicament est administré par voie orale ou en intraveineuse, selon la réputation et l'implication du médecin mais aussi selon l'état d'esprit du patient (son rapport à l'autorité médicale ou sa volonté de guérir, notamment). Mais il y a quand même des limites. Le cerveau et le corps ne peuvent pas tout. Dans le cas des maladies infectieuses, des cancers ou des lésions organiques, l'effet placebo peut être utile, mais il ne peut suffire.
*Imagerie fonctionnelle : technique d'imagerie médicale (IRM, scanner) permettant de visualiser le fonctionnement du cerveau.
**Stimulation magnétique transcrânienne : technique qui consiste à appliquer un champ magnétique en surface du crâne pour moduler l'activité électrique des neurones de la région ciblée et des réseaux qui y sont connectés.
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