Identifier une nouvelle cible thérapeutique pour mieux prendre en charge la pathologie
L'arthrose est la maladie articulaire la plus fréquente, touchant près de 65 % des personnes de plus de 65 ans. Elle se manifeste par une destruction progressive du cartilage, entraînant douleurs et raideurs au niveau des articulations. Bien qu’il n’existe aucun traitement curatif pour l’arthrose, les symptômes peuvent être atténués grâce à des médicaments anti-inflammatoires et surtout, grâce à une hygiène de vie adaptée, incluant une activité physique régulière pour renforcer les articulations.
Les recherches sur l’arthrose visent à développer des traitements innovants pour réduire la douleur et ralentir la progression de cette pathologie, dont la fréquence augmente avec l’âge.
Quelques chiffres sur l'arthrose
L’arthrose est la maladie articulaire la plus fréquente. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), elle a affecté 528 millions de personnes en 2019.
Selon l’Inserm, 10 millions de français sont aujourd’hui concernés et près de la moitié d’entre eux présentent une arthrose dite « symptomatique » se manifestant par des symptômes caractéristiques.
Cette pathologie survient principalement après 50 ans. Toujours selon l’Inserm, 65 % des plus de 65 ans et 80 % des plus de 80 ans sont touchés par l’arthrose.
Qu'est-ce que l'arthrose ?
Une maladie articulaire qui détruit le cartilage
L’arthrose se caractérise par une destruction progressive du cartilage, ce qui engendre une production accrue de liquide synovial, le liquide qui se trouve au niveau des espaces articulaires et qui est sécrété par les cellules du tissu tapissant l’articulation. Cela entraîne un gonflement et des crises inflammatoires. Après plusieurs années d’évolution, elle peut s’accompagner d’une condensation de l’os sous-jacent, voire d’excroissances osseuses appelées « ostéophytes ».
Contrairement aux idées reçues, l’arthrose ne constitue pas une usure normale des articulations. C’est une pathologie à part entière, liée à des phénomènes mécaniques et biologiques qui déstabilisent l’équilibre entre la synthèse et la dégradation du cartilage.
Différentes formes d’arthrose
Aujourd’hui, les mécanismes biologiques et mécaniques impliqués dans l’arthrose sont beaucoup mieux connus. Les chercheurs savent désormais qu’il s’agit d’une maladie de toute articulation, où, en plus du cartilage, l’os, le tissu synovial et le tissu adipeux sont aussi impliqués.
Les chercheurs ont par ailleurs compris que les articulations sont sous l’influence de l’ensemble de l’organisme. Les différentes formes d’arthrose sont donc liées à leur cause principale, notamment l’âge, le surpoids ou des traumatismes articulaires répétés. Certaines arthroses évoluent beaucoup plus rapidement que d’autres, sans que l’on sache encore pourquoi.
Quelles sont les articulations pouvant être touchées par l’arthrose ?
Toutes les articulations peuvent être atteintes par l’arthrose. La maladie peut ainsi toucher la colonne vertébrale, le genou (gonarthrose), la hanche (coxarthrose), le pouce (rhizarthrose), l’épaule, la main, la cheville ou le pied. Selon Ameli, les arthroses du genou et de la hanche concernent respectivement 30 % et 10 % des personnes de 65 à 75 ans. Elles sont plus invalidantes, car elles touchent des articulations importantes qui portent le poids du corps.
Quels sont les facteurs de risque de l'arthrose ?
Les principaux facteurs de risque de l’arthrose
Il existe plusieurs facteurs de risque de développer une arthrose, avec une importance qui varie selon le type d’arthrose en jeu :
- Le vieillissement : selon l’Inserm, l’arthrose ne concerne que 3 % des moins de 45 ans, alors qu’elle touche 65 % des personnes de plus de 65 ans.
- Les anomalies métaboliques : le risque de développer une arthrose est augmenté notamment par l’obésité, le diabète et plus largement par le syndrome métabolique, qui associe une hypercholestérolémie, une hyperglycémie chronique ou une hypertension artérielle à un excès de graisse abdominale.
- Les excès de contraintes mécaniques : le surpoids, certaines activités physiques ou le port de charges lourdes sont aussi des facteurs de risque de l’arthrose.
- La génétique : il existe certaines prédispositions familiales au développement de l’arthrose.
Arthrose secondaire et autres facteurs de risque
Certaines maladies peuvent entraîner une arthrose dite « arthrose secondaire », en modifiant le micro-environnement du cartilage ou la structure de l’articulation. C’est le cas de la polyarthrite rhumatoïde, maladie inflammatoire auto-immune des articulations, de l’hémochromatose, pathologie génétique entraînant une accumulation de fer dans l’organisme, de la goutte, maladie inflammatoire des articulations liée à l’acide urique, ou encore, de certaines maladies osseuses.
Les antécédents de traumatismes au niveau des articulations, comme des fractures ou luxations, et certaines anomalies anatomiques comme la dysplasie de la hanche, sont également des facteurs de risque de développement de l’arthrose.
Quels sont les symptômes de l'arthrose ?
Les manifestations de l’arthrose symptomatique
Lorsqu’elle est symptomatique, l’arthrose entraîne des douleurs et des raideurs au niveau de l’articulation concernée. On peut également observer des gonflements articulaires, voire des déformations. Il peut aussi y avoir une notion de « dérouillage matinal », c’est-à-dire une nécessité de mobiliser des articulations plusieurs minutes le matin pour en faciliter le mouvement. En outre, l’amplitude des mouvements est réduite et associée à une perte de flexibilité globale.
Quelles sont les différentes phases de l’arthrose ?
L’arthrose se manifeste selon deux phases successives qui se répètent tout au long de la maladie à un rythme imprévisible : la crise inflammatoire aiguë, au cours de laquelle le cartilage est détruit, provoquant de fortes douleurs, et la phase chronique, entre les crises, avec un niveau de douleur et de handicap variable selon l’état de l’articulation touchée.
Comment l’arthrose évolue-t-elle ?
L’évolution de l’arthrose est imprévisible. Chez tous les patients, les lésions sont irréversibles, mais elles ne progressent pas toujours à la même vitesse. La maladie peut évoluer très vite et nécessiter une prothèse pour remplacer l’articulation en seulement quelques années. Dans d’autres cas, l’arthrose évolue lentement avec peu de handicap.
Comment l’arthrose est-elle diagnostiquée ?
La radiographie des articulations pour diagnostiquer et suivre l’arthrose
Devant des symptômes évocateurs, le praticien peut avoir recours à la radiographie afin de confirmer le diagnostic. Les lésions d’arthrose au niveau de l’articulation sont en effet très caractéristiques. On peut ainsi observer un amincissement de l’espace séparant les deux os de l’articulation. La radiographie permet également de suivre l’évolution de la maladie, à raison d’une par an ou tous les 2 ans selon la situation du patient. En revanche, il faut noter que l’importance des lésions visibles à la radiographie n’est pas strictement corrélée à la douleur.
Quels sont les traitements contre l'arthrose ?
Il n’existe aujourd’hui aucun traitement « de fond » de l’arthrose, c’est-à-dire aucune thérapie permettant d’enrayer le processus pathologique de manière définitive.
Soulager la douleur de l’arthrose avec des médicaments
La prise en charge de la douleur liée à l’arthrose se fait à l’aide de médicaments. Ces derniers doivent systématiquement être associés à d’autres mesures thérapeutiques, comme une amélioration de l’hygiène de vie.
- Le paracétamol, première ligne de traitement antalgique, est souvent inefficace.
- Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), pris par voie orale ou cutanée, soulagent l’arthrose. Dans le cas d’une prise par voie orale, ils ne doivent pas être utilisés au long court sans avis médical, car ils exposent à un certain nombre d’effets indésirables.
- Les corticoïdes ne peuvent être utilisés que lors des crises inflammatoires. Dans l’arthrose, ils sont souvent administrés sous la forme d’infiltrations directement au niveau de l’articulation touchée, afin de soulager la douleur et de réduire l’inflammation.
- Les opioïdes, dérivés d’opiacés ou morphine, sont en général mal supportés par les patients ou peuvent générer une dépendance, ce qui limite leur utilisation.
- Les injections d’acide hyaluronique, aussi appelées viscosupplémentation, et les anti-arthrosiques symptomatiques d’action lente (AASAL), censés pallier la destruction du cartilage, n’ont pas apporté une preuve d’efficacité clinique suffisante au-delà de l’effet placebo dans les essais cliniques. Cela explique pourquoi l’Assurance maladie ne les rembourse plus depuis quelques années.
Arthrose et hygiène de vie
En pratique, les médecins conseillent aux patients atteints d’arthrose de perdre du poids lorsque cela est nécessaire, et de pratiquer une activité physique régulière qui permet de mobiliser et de renforcer les articulations. Néanmoins, lors des crises inflammatoires d’arthrose, il est important de ne pas forcer et de mettre l’articulation au repos, car c’est au moment des crises que la destruction du cartilage se produit.
Des prothèses chirurgicales pour l’arthrose sévère
La pose d’une prothèse, ou arthroplastie, peut être envisagée lorsque l’articulation est trop atteinte. Il s’agit d’une intervention chirurgicale invasive utilisée en dernier recours, quand l’arthrose génère un handicap trop important.
Quels sont les axes de recherche sur l'arthrose ?
Identifier les facteurs qui influencent le développement de l’arthrose
Un axe important de recherche sur l’arthrose vise à comprendre le rôle de différents facteurs métaboliques ou systémiques dans le développement et l’évolution de la maladie. Ces études permettront par exemple de comprendre pourquoi la présence d’une obésité a un impact à la fois sur l’arthrose du genou, du fait de la pression mécanique, et sur l’arthrose de la main, qui ne subit a priori pas cette même contrainte.
Comprendre les mécanismes de la douleur
Alors que la taille des lésions d’arthrose observées à la radiographie n’est pas corrélée au niveau de douleurs, il apparaît essentiel de comprendre quels autres facteurs entrent en jeu, qu’ils soient mécaniques, inflammatoires ou neuropathiques, afin de proposer un traitement plus adapté aux patients et à la douleur ressentie.
Mettre au point des traitements pharmacologiques
Le manque de traitements disponibles contre l’arthrose pose de réels problèmes de prise en charge. Cela explique pourquoi les chercheurs ont fait de cette question une priorité.
Les thérapies utilisant des molécules, ou biothérapies, ont suscité beaucoup d’espoir. Ces molécules ciblent spécifiquement les mécanismes que l’on pense impliqués dans la maladie. Parmi celles testées, on trouve des anticorps anti-TNF qui bloquent la réaction inflammatoire, des anti-NGF, ciblant certains mécanismes de la douleur, ou encore des facteurs de croissance comme la sprifermine, stimulant le cartilage. Leurs effets sur l’arthrose se sont cependant montrés limités. D’autres molécules sont en cours d’évaluation, notamment des modulateurs qui participent à l’équilibre du cartilage et de son micro-environnement, tels que LNA043, TPX-100, 4P004, HIF-α ou TGF-β.
Des études récentes se penchent aussi sur la « voie Wnt », une cascade de réactions moléculaires impliquée dans le métabolisme du cartilage. Un essai clinique de phase III est en cours pour un médicament appelé lorecivivint, avec l’espoir de confirmer un ralentissement de la destruction du cartilage. Mais les résultats d’une première étude se sont montrés décevants. Une autre molécule, la résinifératoxine, dérivée du piment, fait l’objet de deux essais cliniques de phase III pour son potentiel antalgique qui pourrait durer plusieurs mois après injection intra-articulaire.
En parallèle de la mise au point de traitements, de nouvelles cibles thérapeutiques sont toujours recherchées. Les endothélines pourraient en être une, car si ces molécules sont connues pour réguler la pression artérielle, elles seraient aussi impliquées dans la destruction du cartilage. L’étude de ce mécanisme pourrait orienter le développement de nouvelles biothérapies.
Cap sur les thérapies cellulaires et tissulaires
La thérapie cellulaire, basée sur l’injection de cellules souches directement dans l’articulation, est envisagée depuis plusieurs années. Les résultats de différentes études sont attendus prochainement. Les chercheurs ont également testé des pansements spéciaux pour l’arthrose. A base de nanofibres et de cellules souches, ils pourraient bien aider à régénérer le cartilage.
D’autres approches de thérapies cellulaires sont à l’essai dans le traitement de l’arthrose, comme la technique de microfracture, qui consiste à générer un afflux de sang au niveau du cartilage par microperforation, afin de recruter des cellules souches sanguines capables de se différencier en cellules de cartilage. Des technologies de mosaïcplastie, ou greffe de cartilage, sont aussi en cours d’étude.
La stimulation du nerf vague pour soigner l’arthrose
Dans un tout autre domaine, un essai prometteur a récemment eu lieu. Il a consisté à stimuler le nerf vague afin de produire des effets anti-inflammatoires. Cette approche est déjà utilisée dans le traitement de la migraine ou de certaines douleurs fonctionnelles. Elle a permis de soulager une vingtaine de patients atteints d’arthrose douloureuse de la main, mais les résultats restent à confirmer avec un essai de plus grande ampleur.
Ainsi, aucune piste n’est mise de côté pour améliorer la prise en charge de l’arthrose. A l’avenir, il est fort probable que le traitement de cette maladie articulaire fréquente intègre plusieurs approches thérapeutiques qui seront combinées et adaptées à chaque patient en fonction des caractéristiques de sa maladie et selon la dimension inflammatoire, mécanique ou douloureuse qui prédomine. Une véritable médecine personnalisée en somme !
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