SLA : cibler tous les mécanismes de neuro-inflammation
11 décembre 2024
Thierry Lhermitte, parrain de la FRM, est allé rencontrer l’équipe de Séverine Boillée, chercheuse à l’Inserm, qui dirige l’équipe « Causes de la SLA et mécanismes de la dégénérescence motoneuronale » à l’Institut du cerveau à Paris. Séverine Boillée espère trouver des voies et des cibles thérapeutiques inédites pour ralentir la progression de la SLA. Son équipe est soutenue par la Fondation pour la Recherche Médicale depuis 2021.
Cette rencontre a fait l'objet de la Chronique Santé de Thierry Lhermitte, , diffusée le 2 décembre sur France Inter, à (ré)écouter en replay ci-dessous.
SLA signifie Sclérose Latérale Amyotrophique, on l’appelait avant maladie de Charcot. C’est une maladie neurodégénérative, dans laquelle les cellules nerveuses qui commandent les muscles disparaissent progressivement.
Ces neurones touchés, qui s’appellent les motoneurones, sont à la fois ceux de la commande centrale, qui se prolongent du cerveau à la moelle épinière, et ceux qui prennent le relais depuis la moelle épinière pour innerver les muscles.
Et les conséquences de la mort de ces motoneurones sont terribles !
Cela débute par un affaiblissement des muscles des membres, mais peut aussi toucher les muscles de la déglutition, de la parole.
Au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, la paralysie s’installe et la respiration même devient difficile.
Il n’y a pas de traitement curatif et l’espérance de vie après les premiers symptômes, qui apparaissent en moyenne vers 60 ans, est de 2 à 5 ans, mais la maladie peut être différente d’un patient à l’autre, survenir précocement avant l’âge de 30 ans, parfois évoluer sur plus de 10 ans.
C’est une maladie rare. Aujourd’hui seulement 7 000 patients sont affectés, surtout en raison de la progression rapide de cette maladie.
La SLA est encore mal connue. Dans 10 % des cas elle est due à des mutations dans un gène. À ce jour, une trentaine de gènes différents ont été mis en cause et d’autres restent probablement à découvrir. Et il faut ensuite comprendre les mécanismes en jeu avant de pouvoir proposer un traitement ciblé pour ces formes génétiques.
Chez 90 % des patients, la maladie n’est pas associée à des mutations, mais des mécanismes communs ont été observés chez un grand nombre d’entre eux, ce qui laisse espérer un traitement qui conviendrait à tous.
Et donc la recherche est indispensable !
Séverine Boillée étudie le rôle des cellules immunitaires dans la dégénérescence des neurones moteurs. Son objectif est d’identifier des marqueurs qui pourront permettre de diagnostiquer plus tôt la SLA et, bien sûr, découvrir des pistes pour ralentir sa progression.
Les cellules immunitaires sont en contact avec les neurones et réagissent à leur dégénérescence. Les neurones sont en effet entourés de diverses cellules qui fournissent l’environnement dont ils ont besoin pour fonctionner. Certaines les nourrissent par exemple, d’autres assurent les défenses immunitaires.
Dans le cerveau et la moelle épinière, ces cellules immunitaires s’appellent cellules microgliales. Elles ont leur contrepartie dans les nerfs qui connectent les motoneurones vers les muscles : ce sont les macrophages, qui leur ressemblent beaucoup.
Séverine Boillée et son équipe ont montré que ces deux types de cellules immunitaires contribuent à la progression de la maladie.
D’où l’idée d’agir sur ces cellules pour modifier cette évolution. Mais cibler une cellule à l’intérieur du cerveau ou de la moelle épinière est difficile, donc l’équipe se concentre sur les macrophages à la périphérie, au niveau des nerfs.
Pour ce faire, les chercheurs mettent au point des modèles d’étude très complexes, délicats et longs à obtenir :
ils « fabriquent », entre guillemets, ces deux types de cellules immunitaires avec les caractéristiques de la maladie à partir d’échantillons de cellules de patients, cultivées dans des conditions particulières ;
ils développent aussi des organoïdes, c’est-à-dire des cultures de cellules en 3 dimensions qui reconstituent l’ensemble des cellules présentes autour des motoneurones.
Grâce à ces modèles, ils essaient donc de comprendre le rôle des cellules immunitaires sur la dégénérescence des motoneurones.
Et les premiers résultats sont très intéressants :
les macrophages (qui sont donc les cellules immunitaires à la périphérie) ne réagissent pas de la même façon selon les patients. Cela pourrait expliquer l’évolution différente de la SLA et peut-être servir à différencier les formes ;
L’équipe est aussi sur la piste d’un moyen de bloquer les mécanismes immunitaires toxiques. Elle va tester dans ses modèles de laboratoire si cela permet de ralentir la progression de la SLA.
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