Maladie d'Alzheimer : facteurs de risque et facteurs protecteurs

La maladie d'Alzheimer est multifactorielle. Elle est la conséquence d'une combinaison complexe de différents facteurs : âge, terrain génétique et facteurs environnementaux.

L'âge, premier facteur de risque de la maladie d'Alzheimer

La maladie est une maladie du sujet âgé, touchant dans la plupart des cas des personnes âgées de plus de 65 ans. 15 % de la population de plus de 80 ans est concernée.

Le terrain génétique de la maladie d'Alzheimer

De très rares cas (moins de 1 %) de maladie d’Alzheimer sont des formes familiales héréditaires, liées à un gène muté. Trois gènes différents ont été identifiés à ce jour : APP, PSEN1 et PSEN2.

Si 99 % des cas ne sont pas à proprement parler héréditaires, le terrain génétique individuel joue néanmoins un rôle dans l’apparition de la maladie. C’est ce que les scientifiques appellent la susceptibilité génétique. Ainsi, selon l’Inserm, en moyenne le risque de développer la maladie est multiplié par 1,5 si un parent du 1er degré (parent, fratrie) est touché ; par 2 si au moins deux parents du 1er degré le sont.

Actuellement, plusieurs gènes ont été identifiés comme associés à un risque élevé de développer une maladie d’Alzheimer (les gènes APOE4, SORL1, TREM2 ou ABCA7 par exemple). De nombreuses recherches sont menées pour étudier leur impact. En avril 2022, une équipe germano-suisse a par exemple dévoilé comment la protéine APOE4 contribuait à l’apparition de la maladie d’Alzheimer 1. Il semblerait que cette protéine modifie le transport des lipides dans le cerveau, ce qui conduit à une moins bonne évacuation des lipides toxiques. Une autre étude de 2024 a également montré son implication dans l’accumulation de lipides au niveau de la microglie, des cellules immunitaires du cerveau. Cela contribuerait à la toxicité neuronale.

Au total, environ 80 gènes de susceptibilité ont été identifiés par un consortium international, l’IGAP (International Genomics of Alzheimer's Project), mené par la France. Les chercheurs estiment qu’il reste encore la moitié des gènes à découvrir. Tandis que certains de ces gènes augmentent le risque de survenue de la maladie, d’autres apparaissent protecteurs. Parmi ceux qui favorisent la maladie d’Alzheimer, aucun n’est suffisant pour déclarer la pathologie. La susceptibilité génétique individuelle à la maladie est le résultat d’une association unique de ces différents gènes.

De très nombreuses études visent à élucider la fonction de ces gènes. Elles pourraient permettre de comprendre la genèse de la maladie et trouver des pistes thérapeutiques. Les résultats montrent aujourd’hui que les protéines produites grâce à ces gènes interviennent à différents niveaux :

  • dans la formation des lésions cérébrales,
  • dans l’élimination vers le sang des déchets produits par le cerveau,
  • dans la régulation de la plasticité synaptique (la capacité à générer de nouvelles connexions neuronales ou à éliminer celles inutiles),
  • dans la neuro-inflammation, c’est-à-dire les réactions inflammatoires ayant lieu autour des neurones.

Quels sont les facteurs environnementaux de la maladie d'Alzheimer ?

Ils sont encore mal connus, mais font l’objet de nombreuses recherches. Ils sont particulièrement intéressants en matière de prévention car ils sont modifiables.

En l’absence de traitement à ce jour, la connaissance de ces facteurs modifiables permet d’adopter des comportements préventifs reconnus comme efficaces pour retarder l’apparition de la maladie 2. Ainsi le Haut Conseil de la Santé publique a publié en janvier 2018 un rapport sur la prévention de la maladie d’Alzheimer et des maladies apparentées.


Les facteurs de risque cardiovasculaire de la maladie d'Alzheimer : à contrôler

L’impact négatif important des facteurs de risque cardiovasculaire sur l’apparition de la maladie d’Alzheimer a été rapporté depuis longtemps. Des études ont montré que la composante vasculaire était affectée durant la pathologie.

Il paraît donc crucial de contrôler certains facteurs de risque des maladies cardiovasculaires :

Le sommeil de mauvaise qualité ou d’une durée insuffisante pourraient aussi avoir un impact. Ainsi, une étude a montré un lien entre une durée de sommeil inférieure ou égale à 6 heures entre 50 et 70 ans et le développement ultérieur de la maladie d’Alzheimer (en comparaison avec une population dormant 7 heures ou plus par nuit) 3. Mais ces troubles du sommeil sont-ils une cause ou une conséquence de la maladie ? Pour le moment, la question n’est pas vraiment tranchée, même si des équipes s’y intéressent actuellement 4.


Les facteurs protecteurs de la maladie d'Alzheimer

À côté des facteurs de risque, des facteurs susceptibles de protéger ou retarder l’apparition des symptômes de la maladie d’Alzheimer ont été identifiés :

  • Exercice physique régulier : une étude de 2023 montre à ce propos un impact de la sédentarité sur la survenue d’une démence chez les séniors 5
  • Régime alimentaire de type méditerranéen : une étude a confirmé le bénéfice de ce régime alimentaire contre le déclin cognitif 6
  • Caféine à dose modérée (1 à 2 tasses journalières) : une étude clinique de phase 3 a été lancée en France en 2021 pour valider cet effet potentiel de la molécule : l’étude CAFCA, qui devrait affiner ce point 7
  • Facteurs psychosociaux : haut niveau d’éducation, activité intellectuelle stimulante, relations sociales riches, activités variées (jardinage, danse, lecture…)

Les recherches continuent sur la maladie d'Alzheimer

Quelques premiers résultats

  • En février 2022, une étude statistique de grande ampleur, menée par Carole Dufouil, à l’Université de Bordeaux, et Stanley Durrleman, à l’Institut du Cerveau à Paris, a pointé 10 pathologies qui semblent précéder de 15 ans l’apparition de la maladie d’Alzheimer 8. Il s’agit de la dépression, l’anxiété, l’exposition à un stress important, la perte d’audition, la constipation, la spondylarthrose cervicale, les pertes de mémoire, la fatigue (et les malaises), les chutes et les pertes de poids soudaines. Reste maintenant à préciser s’ils constituent des symptômes précoces ou des facteurs de risque et à découvrir, le cas échéant, les mécanismes en cause.
  • Un travail publié en 2019 a démontré un effet positif de l’adoption d’un mode de vie sain (pas de tabagisme, consommation modérée d’alcool, activité physique, alimentation équilibrée…) sur la survenue d’une démence, et ce même pour les personnes qui présentent un risque génétique élevé 9.
  • Le projet européen Silver Santé Study, coordonné par Gaël Chételat, au Centre Cycéron de Caen, vise à évaluer les effets d’interventions comme la méditation ou l’apprentissage d’une langue étrangère sur la santé mentale et le vieillissement en bonne santé 10. Ce projet a livré en 2022 de premiers résultats intéressants. Les chercheurs ont montré que méditer pendant 18 mois a un impact positif sur l’attention et la régulation des émotions, associées au bien-être, chez les personnes âgées 11.
  • Concernant les facteurs de risque de développer la maladie, une étude réalisée aux Etats-Unis et publiée dans le Proceedings of the National Academy of Sciences en décembre 2022 pointe du doigt un impact de la pollution aux particules fines sur le développement de la pathologie. Elle majorerait le risque 12.

Les études à suivre

  • L’étude finlandaise FINGER, menée chez plus de 1 000 participants d’âge moyen 70 ans, était la première étude à long terme et à grande échelle à montrer le bénéfice d’interventions multiples sur le mode de vie (régime alimentaire, activité physique, entraînement cognitif, gestion du risque cardiovasculaire) pour préserver les capacités cognitives et prévenir le risque d’apparition de troubles cognitifs 13. Le même type d’études est aujourd’hui étendu à plusieurs pays sur tous les continents, via un réseau collaboratif international, World-Wide-FINGERS 14. Son objectif est d’établir des preuves scientifiques susceptibles d’orienter les politiques de santé publiques en matière de prévention de la maladie d’Alzheimer. Le suivi des participants s’arrêtera en 2030.

Références

  1. Lindner K, et al. Isoform- and cell-state-specific lipidation of ApoE in astrocytes. Cell Reports 38 : 2022.
  2. Norton S. Potential for primary prevention of Alzheimer's disease: an analysis of population-based data. The Lancet Neurology 2014 ; 8 : 788–94.
  3. Sabia, S, Fayosse, A, Dumurgier, J et al. Association of sleep duration in middle and old age with incidence of dementia. Nat Commun 2021 : 12, 2289. Lien DOI
  4. Raichlen Da et al. Sedentary Behavior and Incident Dementia Among Older Adults. JAMA 2023 ; 330 : 934-40.
  5. André C et al. Rapid-eye-movement sleep, neurodegeneration and amyloid deposition in ageing. Annals of Neurology 2023 / Communiqué Inserm
  6. Ballarini T, Melo van Lent D, Brunner J et al. Mediterranean Diet, Alzheimer Disease Biomarkers and Brain Atrophy in Old Age. Neurology 2021 ; 5 ; 96 : e2920-e2932. DOI: 10.1212/WNL.0000000000012067
  7. Site de l’étude CAFCA
  8. Nedelec T et al. Identifying health conditions associated with Alzheimer’s disease up to 15 years before diagnosis: an agnostic study of French and British health records, The Lancet Digital Health 2022 ; 4: e169–78.
  9. Lourida I et al. Association of Lifestyle and Genetic Risk With Incidence of Dementia. JAMA 2019 ; 322 : 430-7.
  10. Site de la Silver Santé Study
  11. Chételat G et al., the Medit-Ageing Research Group. Effect of an 18-Month Meditation Training on Regional Brain Volume and Perfusion in Older Adults: The Age-Well Randomized Clinical Trial. JAMA Neurology 2022, 79 : 1165-74 .
  12. Shi L et al. Incident dementia and long-term exposure to constituents of fine particle air pollution: A national cohort study in the United States. December 27, 2022 120 (1) e2211282119.
  13. Solomon A., et al. Effect of the Apolipoprotein E Genotype on Cognitive Change During a Multidomain Lifestyle Intervention. A Subgroup Analysis of a Randomized Clinical Trial. JAMA Neurol 2018 ; 75 : 462-70.
  14. Site World Wide Fingers – Alzheimer’s Association

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