Intelligence artificielle : mieux sélectionner les patients éligibles à une combinaison entre immunothérapie et radiothérapie anticancéreuse
Les cancers du cerveau sont des tumeurs cérébrales, telles que les glioblastomes et les méningiomes. Ils touchent près de 5 900 personnes chaque année en France. Provoquant des symptômes variés tels que des maux de tête, des crises d’épilepsie ou des troubles cognitifs, ils nécessitent un diagnostic précis à l’aide d’une IRM et d’une biopsie.
La prise en charge des cancers du cerveau combine chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie, avec des recherches prometteuses sur l’immunothérapie et la perméabilisation de la barrière hématoencéphalique pour améliorer l’efficacité des traitements.
Le point de vue de l'expertPr Marc Sanson
Il faut distinguer deux grands types de cancer du cerveau : d'une part les tumeurs primitives qui naissent initialement dans le système nerveux, et d'autre part les tumeurs dites secondaires, qui naissent dans d'autres organes et vont métastaser le cerveau.
Quelques chiffres sur les cancers du cerveau
Les cancers du cerveau sont des tumeurs du système nerveux central dont l’origine se trouve dans le cerveau, le tronc cérébral, le cervelet ou la moelle épinière. En 2018, près de 5 900 nouveaux cas ont été diagnostiqués en France selon l’INCa, ce qui représente un peu plus de 1 % des cancers déclarés chaque année. Parmi les tumeurs du cerveau, les glioblastomes sont les formes les plus agressives. Ils concernent autour de 3 480 cas recensés en 2018.
L’INCa précise que pour les cas de tumeurs du système nerveux central diagnostiqués entre 2005 et 2010, 19 % des hommes et 21 % des femmes sont encore en vie 5 ans après le diagnostic. En 2018, ces tumeurs ont globalement causé plus de 4 100 décès. Par ailleurs, le nombre de nouveaux cas annuels a presque doublé entre 1990 et 2018, soulignant l’augmentation significative de leur incidence.
Qu’est-ce qu’une tumeur cérébrale ?
Une tumeur cérébrale est la conséquence de la multiplication anarchique d’un type de cellules dans le cerveau, formant une masse à cet endroit. Les tumeurs du cerveau se répartissent en deux catégories : les tumeurs primitives, qui naissent dans le cerveau, et les tumeurs secondaires, qui correspondent à des métastases issues d’un cancer localisé dans une autre partie de l’organisme. Certains cancers présentent tout particulièrement des risques de former des métastases dans le cerveau, comme le cancer du sein, le cancer des poumons ou le cancer de la peau.
Les tumeurs primitives du cerveau peuvent prendre naissance dans toutes les zones du cerveau et à partir de nombreux types cellulaires. On distingue ainsi un très grand nombre de tumeurs différentes, dont l’agressivité et le pronostic varient également.
Quels sont les différents types de cancers du cerveau ?
Il existe de nombreux types de cancers du cerveau différents, mais certaines formes sont beaucoup plus fréquentes que d’autres. C’est le cas des gliomes, des méningiomes et des médulloblastomes.
Les gliomes
Les gliomes représentent la majorité des cancers du cerveau. La tumeur dérive ici de la glie, un ensemble de différents types de cellules cérébrales, moins connues que les neurones, mais plus nombreuses et assurant des fonctions très variées de protection, de soutien ou de nutrition. On parle d’astrocytomes pour les tumeurs issues des astrocytes, d’oligodendrogliomes pour les tumeurs issues des oligodendrocytes, ou encore de glioblastomes, qui ne sont pas rattachés à un type de cellules gliales en particulier. Les glioblastomes constituent la forme la plus agressive des tumeurs cérébrales. Ils se distinguent ainsi des autres gliomes qualifiés de tumeurs infiltrantes à progression lente.
Les méningiomes
Les méningiomes sont des tumeurs bénignes dans 90 % des cas selon Ameli. Comme leur nom l’indique, elles proviennent des méninges, les membranes qui enveloppent le cerveau et la moelle épinière. Les méningiomes représentent 30 % des tumeurs cérébrales primitives d’après Orphanet.
Les médulloblastomes
Les médulloblastomes sont les tumeurs du cerveau les plus fréquentes chez l’enfant. Elles se développent au niveau du cervelet, une structure située à l’arrière du cerveau et notamment impliquée dans la coordination des mouvements.
Les autres cancers du cerveau
Parmi les autres cas fréquents de cancers du cerveau, on retrouve, à tout âge, les adénomes hypophysaires, des tumeurs localisées au niveau de l’hypophyse, une glande chargée de synthétiser des hormones, et les neurinomes, ou schwannomes, qui concernent les cellules de Schwann, productrices de la gaine de myéline entourant les prolongements des neurones.
Quels sont les facteurs de risque du cancer du cerveau ?
L’origine des tumeurs cérébrales est encore mal comprise. Seuls deux facteurs de risque ont été clairement établis, mais ils ne concernent pas tous les cancers du cerveau. Il s’agit des irradiations et de l’immunodépression. Bien qu’une recherche active vise à identifier d’autres facteurs de risque de développer une tumeur cérébrale, comme l’exposition à des produits chimiques ou l’utilisation du téléphone portable, aucun résultat ne confirme ces hypothèses. Des facteurs de risque génétiques ont également été identifiés dans certains types de cancers du cerveau, tels que les gliomes.
Quels sont les symptômes du cancer du cerveau ?
Des symptômes tardifs et peu spécifiques
Les signes cliniques d’un cancer du cerveau, et surtout le pronostic associé, varient selon la nature des cellules à partir desquelles les tumeurs se forment, mais aussi selon la localisation des tumeurs, leur taille et leur vitesse de développement. En général, les premiers symptômes n’apparaissent que lorsque la taille de la tumeur cérébrale a atteint plusieurs centimètres. Aussi, ils sont assez peu spécifiques, ce qui explique pourquoi les cancers du cerveau sont souvent découverts par hasard et à un stade avancé.
Les premiers signes d’une tumeur cérébrale
Deux principaux symptômes peuvent révéler la présence d’une tumeur cérébrale. Le premier est l’apparition de maux de tête inhabituels (céphalées), dus au volume de la tumeur qui augmente la pression dans le crâne, pouvant aller jusqu’à une hypertension intracrânienne accompagnée de nausées et de vomissements. Le deuxième symptôme est la survenue de crises d’épilepsie déclenchées par la tumeur. Des troubles de la parole, des pertes d’équilibre, une paralysie partielle et des troubles cognitifs affectant la mémoire ou le comportement peuvent aussi survenir, en lien avec la fonction des zones cérébrales touchées par la maladie.
Comment diagnostiquer une tumeur cérébrale ?
L’imagerie cérébrale pour repérer une tumeur
Devant des symptômes évocateurs à l’examen clinique, le praticien peut avoir recours à l’imagerie cérébrale pour dépister une éventuelle tumeur du cerveau. Le plus souvent, c’est la technique d’imagerie par résonnance magnétique (IRM) qui est utilisée, car elle permet de visualiser avec une grande précision les organes et les tissus mous dans différents plans de l’espace ou en trois dimensions. Plusieurs clichés sont réalisés pour apprécier le volume de la masse tumorale, sa localisation et ses contours. Ces informations sont essentielles pour déterminer si la tumeur cérébrale est bien délimitée ou si elle envahit des zones adjacentes (tumeur infiltrante), si elle comporte de nombreux vaisseaux sanguins ou des cellules mortes prématurément. Ces différentes observations témoignent de l’agressivité de la tumeur.
La biopsie pour caractériser la tumeur cérébrale
L’examen d’imagerie est complété par une biopsie tumorale. Il s’agit de prélever un morceau de la tumeur et de l’envoyer en laboratoire afin de procéder à son analyse par microscopie et à l’aide de tests moléculaires. Dans certains types de cancer du cerveau, une ponction lombaire peut être réalisée pour récupérer des cellules tumorales. Ces examens permettent de déterminer le grade de la tumeur, c’est-à-dire son stade de développement et son agressivité. Celui-ci va du stade I (tumeur bénigne ou peu agressive) au stade IV (tumeur de haut grade, très agressive) et permet d’orienter le choix de la thérapie proposée au patient.
Quels sont les traitements pour le cancer du cerveau ?
Le traitement d’un cancer du cerveau dépend très largement de son stade de développement, du type de tumeur identifié, de sa localisation et de son agressivité.
La neurochirurgie
Lorsque cela est possible, la première phase du traitement d’un cancer du cerveau consiste à utiliser la neurochirurgie pour retirer le maximum de tissu tumoral, sans provoquer de handicap. En effet, contrairement aux tumeurs localisées ailleurs dans l’organisme, le neurochirurgien ne peut pas se permettre de retirer du tissu sain autour de la tumeur pour éviter d’éventuelles récidives, sous peine de séquelles neurologiques graves et irréversibles.
Afin d’augmenter la précision de son geste et de retirer le maximum de cellules tumorales, le praticien a recours à la microscopie et à des techniques de repérage. La plus ancienne est la stéréotaxie. Couplée à un examen d’imagerie, elle consiste à poser une sorte de cadre autour du crâne du patient permettant d’obtenir les coordonnées de la zone à extraire dans les trois dimensions de l’espace. Depuis maintenant plusieurs années, il existe une autre méthode, la neuronavigation. La veille de l’intervention, plusieurs examens d’imagerie sont réalisés afin de créer une cartographie en 3D du cerveau du patient et de sa tumeur. Le chirurgien s’en sert pour simuler et répéter informatiquement le geste opératoire afin de le réaliser dans les meilleures conditions le jour J. Cette technologie permet d’opérer avec une précision de l’ordre du millimètre, ce qui en fait l’outil chirurgical le plus précis.
Dans certains cas, le patient est éveillé pendant l’intervention afin de vérifier sa réaction à des stimulations corticales. Le chirurgien utilise un stylet pour repérer à l’aide de décharges électriques les zones liées à des fonctions importantes, comme le langage ou la motricité, et s’assurer qu’elles ne sont pas touchées au cours de l’opération. Cette technique est particulièrement utile pour préserver les fonctions essentielles lorsque la tumeur est proche de zones sensibles, avec des fonctions importantes.
Enfin, il existe une autre technique de neurochirurgie pour la prise en charge des tumeurs isolées et de très petites tailles, le gamma knife, une forme de « bistouri » qui délivre des rayons gamma pour éliminer une tumeur de manière très précise.
La radiothérapie
En parallèle de la chirurgie, la radiothérapie est un traitement très largement utilisé pour soigner les cancers du cerveau. Elle consiste à délivrer des rayons ionisants pour cibler les cellules tumorales tout en limitant les dommages aux tissus sains. Ce traitement suit un protocole précis, déterminé par des examens d’imagerie qui définissent la dose et le nombre de séances nécessaires. Parmi les techniques utilisées, on peut citer la radiothérapie conformationnelle 3D, la modulation d’intensité ou encore la radiothérapie stéréotaxique. Cela dépend du type de tumeur concerné et de sa localisation.
La chimiothérapie
La chimiothérapie vise quant à elle à détruire les cellules tumorales avec des médicaments. Elle peut être utilisée seule ou combinée avec la radiothérapie, avant ou après une chirurgie, pour réduire la taille des tumeurs ou éliminer les cellules cancéreuses résiduelles. L’efficacité de ces traitements peut cependant être limitée par plusieurs facteurs, en particulier par la barrière hématoencéphalique, qui protège le cerveau. Cette barrière agit comme un « filtre » dans la paroi des vaisseaux sanguins, empêchant certaines molécules, cellules et agents pathogènes d’atteindre les neurones. Les traitements médicamenteux doivent donc être capables de la traverser pour être efficaces.
Quels sont les axes de recherche sur le cancer du cerveau ?
Décrypter les mécanismes de la progression tumorale
La recherche fondamentale étudie minutieusement les cellules qui composent la tumeur cérébrale et leur microenvironnement. L’objectif est de décrypter les mécanismes moléculaires à l’origine du processus de cancérisation puis de la progression tumorale, pour mieux les contrer. Des chercheurs ont par exemple mis en évidence le rôle du réseau lymphatique méningé sur la régulation de la réponse immunitaire dans le cas du glioblastome. D’autres chercheurs étudient les mécanismes qui conduisent à la résistance des cellules cancéreuses face aux traitements, ou à la récidive des tumeurs cérébrales. Ces projets sont essentiels pour développer de nouvelles thérapies ciblées, c’est-à-dire des thérapies spécifiques aux caractéristiques moléculaires des tumeurs du cerveau.
Optimiser les traitements contre le cancer du cerveau
Les chercheurs se penchent aussi sur l’amélioration des traitements existants. Ils étudient notamment les manières de rendre temporairement perméable la barrière hématoencéphalique pour une meilleure délivrance des molécules de chimiothérapie. Leur intérêt se porte entre autres sur une technique basée sur les ultrasons. Un boîtier positionné sur le crâne émet des ondes qui rendent les vaisseaux perméables pendant quelques minutes : un laps de temps durant lequel la chimiothérapie pourrait pénétrer le tissu nerveux en profondeur. Les chercheurs travaillent également sur la conception de molécules thérapeutiques capables de traverser cette barrière, ou encore sur des approches de délivrance des thérapies directement au sein des tumeurs.
Plus classiquement, les chercheurs testent des stratégies de repositionnement de molécules. Elles consistent à expérimenter des traitements ayant fait leurs preuves au cours de la prise en charge d’autres cancers, voire même d’autres maladies sans relation avec les cancers. Certaines molécules sont associées à des résultats prometteurs. Un traitement s’est montré capable de stopper la multiplication des cellules tumorales dans des organoïdes cérébraux, des sortes de mini cerveaux. Mais il reste à prouver son efficacité sur des modèles précliniques, puis sur l’Homme.
Toujours du côté des traitements, les chercheurs souhaitent également augmenter l’efficacité de la radiothérapie. Ils tentent ainsi de développer des molécules qui, une fois dans la tumeur, pourraient augmenter la mort des cellules avec les rayons ionisants. La photothérapie dynamique est une autre approche explorée. Elle consiste à administrer des molécules « photosensibles » au niveau de la tumeur, puis à les exciter avec une lumière pour générer des composés toxiques pour les cellules cancéreuses. De premiers essais sont prometteurs.
Enfin, la chirurgie, qui constitue la première ligne de traitement dans de nombreux cas de cancers du cerveau, bénéficie aussi des avancées de la recherche. La mise au point de nouvelles techniques apportant plus de précisions sur les caractéristiques des tumeurs cérébrales, comme la détection de l’activité électrique anormale des cellules cancéreuses, permet de mieux délimiter les contours de la tumeur, mais également de mieux discriminer les tissus sains des cellules cancéreuses. Ces éléments sont essentiels pour améliorer le geste chirurgical.
Développer la piste de l’immunothérapie
L’immunothérapie stimule des propriétés antitumorales du système immunitaire. Les essais d’immunothérapies ayant fait leurs preuves dans la prise en charge des mélanomes ou des cancers du poumon se sont cependant montrés décevants dans le cadre des cancers du cerveau et notamment des glioblastomes.
D’autres approches d’immunothérapie sont explorées : la vaccination thérapeutique, qui consiste à activer certaines cellules immunitaires pour qu'elles s’attaquent aux cellules cancéreuses, et les systèmes CAR-T ou CAR-NK, qui utilisent des lymphocytes T ou « naturel killer » extraits du patient et génétiquement modifiés en laboratoire pour les rendre capables de reconnaître et de détruire spécifiquement les cellules cancéreuses une fois réinjectées chez le patient. Une étude très récente a montré une efficacité conséquente, mais seulement transitoire, pour une immunothérapie de type CAR-T chez trois patients atteints d’un glioblastome. Ces résultats encouragent tout de même à poursuivre la piste de l’immunothérapie dans les prochaines années.
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